Gueule de bois

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Photo : John Althouse Cohen

J’avais pas envie ce matin. Pas envie du tout. Mais il y avait pas mal de boulot qui m’attendait, donc je me suis mis au boulot. Et j’arrive même à être plutôt efficace, malgré mes divagations sur Facebook et ailleurs. Mais pendant que je travaille, je ne pense qu’à une chose.

Aujourd’hui, rien n’a de saveur particulière. Moi qui ai déjà tant de mal à comprendre le monde, aujourd’hui j’ai l’impression de ne plus rien comprendre du tout. Difficile de dire, cette fois, que les victimes l’avaient un peu cherché, quoiqu’en dise un certain el-Assad. Difficile d’imaginer que des personnes qui vont boire des verres entre amis ou aller voir un concert méritent des balles dans la tête. Je suis sûr qu’une grande partie de ces personnes étaient contre toute intervention militaire quelle qu’elle soit, et particulièrement contre la présence occidentale en Irak, en Syrie ou ailleurs parce que le pétrole, on aimerait bien s’en débarrasser.

Des innocents. Des civils qui n’ont aucune influence. Et de l’autre côté, des lâches. Qui se font sauter quand la sécurité d’un stade les empêche d’entrer. « Si c’est comme ça je me fais sauter! »

Je n’ai pas la nationalité française. Dans ma difficulté à comprendre ce monde de fous, je ne comprenais pas, non plus, étant un « étranger » ayant grandi en France, le concept de nationalité, mais aujourd’hui, je commence à comprendre qu’être français, c’est un peu plus qu’un bout de papier. C’est un peu plus qu’un petit bouquin qu’on ne lit jamais, que certains brûlent arrivés à Racca, que d’autres échangent contre de la vodka. Être français, être Charlie, être aléatoirement abattu à Paris, c’est quelque chose qui me semble dépasser des frontières physiques et somme toute artificielles. Finalement, être français, c’est peut-être la même chose qu’être néerlandais, américain, syrien, libanais ou congolais. C’est peut-être rien de plus que d’avoir un coeur qui bat, l’envie d’être libre et qu’on nous foute la paix. Si cette définition touche, de près ou de loin, la vérité, eh bien moi aussi, je suis français et fier de l’être.

Arrêtez les polémiques. Laissez les gens mettre un filtre bleu-blanc-rouge sur leur photo de profil, laissez les croyants prier pour Paris, laissez tout le monde exprimer le choc qu’ils ont ressenti à leur manière parce que tout le monde le vit à sa manière. Ne sombrons pas dans l’isolement, n’isolez personne et ne vous isolez pas des autres. Ouvrez-vous. Essayez de comprendre les autres. Dialoguez. Acceptez les sentiments des autres.

Le mal existera toujours mais si on l’affronte ensemble, il fait moins… mal.

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Photo : Yann Caradec

Article écrit à l’origine sur Facebook le lundi 16 novembre